Oligui Nguema, “civil” sur papier, général dans l’âme : le coup d’État continue, version électorale

La normalisation du putsch déguisé en élection

Oligui Nguema, “civil” sur papier, général dans l’âme : le coup d’État continue, version électorale

Dans un numéro de prestidigitation politique comme seule l’Afrique post-putschiste sait les produire, Brice Clotaire Oligui Nguema, tombeur d’Ali Bongo et actuel homme fort du Gabon, annonce qu’il sera candidat à la présidentielle prévue en 2025. Mieux — ou pire : il précise qu’il a renoncé à son statut de militaire pour concourir “en tant que civil.”

Ah, le miracle du costume civil, ce sésame magique censé faire oublier les bottes, les baïonnettes et les promesses piétinées. Mais ne soyons pas dupes : ce n’est pas une transition démocratique, c’est une continuité autoritaire savamment déguisée. Le général se déshabille, mais l’armée reste au pouvoir.

Quitter l’uniforme, ce n’est pas quitter la logique du pouvoir absolu

Oligui Nguema peut bien déposer ses galons et arborer un blazer sur mesure, le fond du problème reste intact : il est l’architecte et le bénéficiaire d’un coup d’État. Et plutôt que d’organiser un retour à l’ordre constitutionnel, comme il l’avait solennellement promis, il a savamment prolongé son règne sous prétexte de “transition”, verrouillé les institutions, et maintenant… il s’autoproclame candidat “civil”.

C’est du déjà-vu, recyclé, formaté : du Sissi égyptien au Déby tchadien, en passant par Doumbouya qui s’y prépare en coulisses, la méthode est toujours la même :

  1. On renverse un dictateur.
  2. On promet la démocratie.
  3. On suspend tout.
  4. On se fait acclamer.
  5. Et on finit… élu président avec l’étiquette de “sauveur”.

Un “civil” adoubé par l’armée : cherchez l’erreur

Oligui peut bien prétendre être civil, c’est tout l’appareil militaire qui continue de le porter à bout de bras. Les structures de la transition sont remplies de ses fidèles. L’opposition est fragilisée, les médias encadrés, les libertés surveillées. Le fichier électoral ? Biaisé. Le débat public ? Timoré. L’environnement électoral ? Contrôlé de A à Z.

Et quand bien même il abandonnerait formellement son statut militaire, il reste un général de carrière, un homme de caserne, un stratège du silence, formé pour commander, pas pour débattre.

Sa candidature n’est pas une surprise : c’est l’aboutissement logique d’un plan cousu depuis le premier jour. Ce n’est pas un civil qui entre en politique. C’est le militaire qui veut y rester.

La normalisation du putsch déguisé en élection

Ce que Oligui offre au Gabon, ce n’est pas un choix démocratique. C’est une opération de blanchiment politique : faire passer un pouvoir issu d’un coup de force pour une volonté populaire exprimée dans les urnes. Et malheureusement, le peuple n’a pas grand-chose à dire là-dedans.

Il votera, peut-être. Mais entre qui et quoi ? Un général déguisé en démocrate, face à une opposition affaiblie, dépourvue de moyens, et encore traumatisée par des décennies de régime Bongo. Le match est déjà plié, les dés pipés, le script écrit.

Oligui Nguema, président ? C’est comme si le cambrioleur revenait dans la maison pour “protéger” les occupants.

Un modèle dangereux pour tout le continent

La candidature d’Oligui est aussi un mauvais signal pour l’Afrique. Elle envoie un message clair aux militaires :

« Prenez le pouvoir, promettez une transition, changez d’uniforme, et finissez par être élu. »

C’est un modèle toxique. Un précédent inquiétant. Et une trahison pure et simple de l’idée même de rupture démocratique. Le Gabon n’a pas renversé un système : il a simplement changé le nom sur la plaque.

Brice Oligui Nguema est peut-être civil aujourd’hui, mais il reste le général d’un régime qui n’a jamais quitté le terrain militaire. Sa candidature n’est pas une avancée. C’est une confiscation du processus démocratique par celui qui devait en garantir la restauration.

Et derrière le sourire lisse du “nouveau civil”, c’est toujours la même main de fer qui tient les rênes.

PAR CONAKRYLEMAG.COM

— conakrylemag

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