Tiani au Niger : cinq ans de pouvoir “modulables” et l’enterrement express de la démocratie

Dissolution des partis : l’obsession du pouvoir total

Tiani au Niger : cinq ans de pouvoir “modulables” et l’enterrement express de la démocratie

À peine installé sur le fauteuil présidentiel, le général Abdourahamane Tiani n’a pas perdu de temps : il s’offre cinq années de pouvoir sur-mesure, « modulables » s’il vous plaît, et dans la foulée, il dissout tous les partis politiques. Rideau. Circulez, il n’y a plus rien à voter. Un véritable braquage institutionnel, exécuté avec un calme glacial, comme si piétiner la démocratie devenait un acte administratif banal.

Pendant que les tambours résonnent à Niamey pour célébrer l’accession du putschiste à la présidence, la République, elle, se fait enterrer sans fleurs ni couronnes.

Cinq ans “modulables” : quand l’arbitraire devient une clause légale

Il fallait oser. Se faire investir chef d’État après un putsch, et proclamer une durée de transition de cinq ans « modulables selon les circonstances ». Autrement dit : “Je reste tant que ça m’arrange.” Le mot “modulable” n’est pas anodin. Il est l’expression même de l’arrogance militaro-politique, cette nouvelle race de dictateurs qui ne prend même plus la peine de mentir avec style.

En gros : Tiani pourra prolonger son règne à volonté. Si la “situation” l’exige. Si le “contexte” est défavorable. Si l’opposition fait mine de se réveiller. Si les partis contestent. Et justement… ils n’en auront même pas l’occasion.

Dissolution des partis : l’obsession du pouvoir total

Car à peine la formule de serment terminée, Tiani a signé la mise à mort de tous les partis politiques. Un décret. Froid. Brutal. Définitif. Tous les mouvements politiques sont suspendus, dissous, balayés d’un revers d’uniforme. Plus besoin d’opposants, de débats, d’élections, ou même de débats houleux au Parlement : la pensée unique est rétablie. Et celui qui bronche, direction le silence ou la cellule.

Voilà le projet. Pas une transition, mais une transgression. Pas une refondation démocratique, mais une confiscation absolue du pouvoir par des militaires qui prennent les institutions pour des trophées.

Une junte qui n’assume même plus son camouflage

Autrefois, les putschistes prenaient la peine de promettre des élections, de flatter la démocratie, de faire mine d’agir pour le peuple. Tiani, lui, assume la verticalité autoritaire, sans fioritures. Il gouverne par décret. Il muselle toute voix discordante. Il “module” la durée de son pouvoir comme un dictateur de salon. Et le peuple ? Spectateur contraint. Prisonnier d’un discours martial, pris en otage par une rhétorique nationaliste creuse, pendant que les libertés fondent comme neige au Sahel.

L’enterrement de la démocratie avec les honneurs militaires

Ce qui se joue au Niger dépasse le cadre national. C’est un laboratoire de la nouvelle tyrannie militaire post-moderne : pas de président élu, pas de partis, pas de contre-pouvoir, mais une façade institutionnelle entretenue par des communiqués, des fanfares et des décrets. Et pour maquiller l’ensemble : un mot magique, « souveraineté ».

Car chaque dictature a besoin de son vernis. Pour Tiani, ce sera la lutte contre les ingérences étrangères, le rejet des anciennes puissances, le retour à l’Afrique des Africains. Des slogans patriotiques détournés pour justifier l’extinction méthodique de la vie politique.

Pendant ce temps, la CEDEAO dort, et le peuple trinque

Et la communauté régionale ? Silence. Inertie. Complicité molle. La CEDEAO, déjà humiliée par les précédents coups d’État au Mali, au Burkina Faso et en Guinée, assiste en spectatrice à cette nouvelle mise en bière de la démocratie, sans la moindre réaction digne. Tout le monde regarde ailleurs.

Et le peuple nigérien, lui, voit ses droits s’évaporer. Il n’a plus de partis pour le représenter, plus de leaders pour parler en son nom, plus d’horizon politique. Juste une junte bien installée, bien armée, bien décidée à faire durer le supplice.

Le Niger de Tiani devient un cas d’école : comment transformer un coup d’État en pouvoir à vie, sans même un simulacre d’élection. Le tout, dans un calme glaçant.

Cinq ans de “transition modulable”. Une phrase. Et la démocratie, elle, est partie sans préavis.

PAR CONAKRYLEMAG.COM

— conakrylemag

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