« La nouvelle Constitution m’autorise à faire deux mandats à partir de 2020. Je ne prendrai ma décision définitive qu’à ce moment là, en fonction de la situation de la Côte d’Ivoire. La stabilité et la paix passent avant tout, y compris avant mes principes »
Ces propos du Président ADO rapportés par le dernier numéro de JA prouvent, s’il en était besoin, que la démocratie n’est pas simplement une question de textes. Le constituant et le législateur ne peuvent jamais prévoir toutes les situations de fait qui peuvent arriver.
C’est pourquoi, il y a souvent et inéluctablement des failles qui peuvent être constatées dans un texte et dont certains pourraient tirer profit. Au Burundi, lorsque la question de la limitation de mandats s’est posée, le Président Pierre NKurunziza qui avait déjà passé deux mandats à la tête du pays et qui voulait briguer un 3ème mandat, avait soutenu a l’époque que la première fois qu’il avait été élu, c’était au suffrage universel indirect. Il faisait valoir qu’il n’avait été élu au suffrage universel direct qu’une seule fois.
Étant donné que la limitation de mandats ne concernait que le suffrage universel direct, il avait en conséquence droit à un second mandat puisque le premier mandat ne comptait pas.
Le constituant ne pouvait vraiment pas prévoir une telle argumentation.
Au Sénégal, un problème d’une autre nature s’était posé. Il s’agissait en effet de la rétroactivité ou non d’une révision constitutionnelle. Aujourd’hui, le Président Ouattara interprète la nouvelle constitution dans le sens d’une remise à zéro des compteurs à partir de 2020. Or, il n’est pas sûr que tel était l’esprit du constituant ivoirien.
Tous ces exemples démontrent que la démocratie n’est pas encore une fois une simple question de droit. C’est aussi un état d’esprit. Lorsqu’on n’a pas l’esprit démocratique, on trouvera toujours des vides juridiques, des failles pour contourner des obstacles juridiques que le législateur penser poser mais qu’il n’a pas clairement posé. C’est pourquoi, il faut saluer le Président nigérien qui a déclaré sans équivoque et à chaque fois que l’occasion lui en a été donnée d’affirmer et de réaffirmer son aversion pour un 3ème mandat.