Près de trois ans après son entrée en fonction, le gouverneur de la Banque centrale, Dr Louncény Nabé, peut être satisfait. L’inflation a nété maîtrisée et le système bancaire assaini.
Sa nomination comme gouverneur de la Banque centrale de la République de Guinée (BCRG), le 27 décembre 2010, par le Président Alpha Condé, était-elle un cadeau de fin d’année personnel ou pour la Guinée ? lorsqu’il prend les rênes de l’institution monétaire, les défis énormes. Il faut stopper l’hémorragie financière suscitée par la junte, maîtriser l’inflation, alors de 21%, et engager de profondes réformes du système bancaire. Aujourd’hui, l’inflation est en baisse (11,7% en août), et le franc guinéen se stabilise. La Banque centrale exerce pleinement ses fonctions et vient d’instaurer un nouveau système de comptabilité dénommé « sysco BCRG ». Les résultats laissent espérer des perspectives encourageantes : « C’est un tournant important dans le système économique et financier pour les prochaines années. La plupart des réformes seront opérationnelles en 2014 et on aura une physionomie toute nouvelle du système bancaire et financier de Guinée », précise Louncény Nabé.
De l’enseignement à la banque
Né le 20 mars 1955 à Dabola, à environ 450 kilomètres de Conakry, au centre de la Guinée, Dr Louncény Nabé débute sa carrière en 1980 au Centre national de productivité. Il est alors titulaire d’un DES en économie-finances de la faculté des sciences administratives de l’Institut polytechnique de Conakry, avec mention « très bien ». Afin de mieux se préparer à affronter le marché du travail, il s’envole pour la Tchécoslovaquie en 1983. A la faculté des sciences économiques de l’Ecole supérieure des mines d’Ostrava, il décroche un doctorat en science économiques. De retour au pays quatre ans plus tard, sa carrière se poursuit dans l’enseignement. Il est chargé d’assurer une remise à niveau des fonctionnaires de l’administration économique et financière au Centre national de perfectionnement à la gestion. Louncény Nabé entre dans le secteur bancaire en 1989.
Son dossier de candidature retient l’attention des dirigeants de ka BCRG. « J’ai été recruté sous les auspices de l’actuel Ministre d’Etat chargé de l’Economie et des finances, Kerfalla Yansané, alors Gouverneur de la BCRG. C’est lui qui a demandé aux services de la banque centrale d’organiser un entretien pour voir ce dont je suis capable », se souvient-il. Le test de recrutement se passe avec succès. Commence alors une riche carrière au sein de la plus importante institution bancaire de la Guinée. Il en gravit les échelons : contrôleur interne des journées comptables, chef de service des banques à la Direction du crédit des banques, puis, à 39 ans, directeur des banques et assurances.
Fin connaisseur des questions économiques du pays, celui qui arbore une spécialisation bancaire du Centre d’études de l’Agence française de développement (AFD) à Paris, quitte momentanément les couloirs de Banque centrale pour le Ministère de l’économie et des Finances où il est nommé directeur, en charge notamment de la restructuration du secteur parapublic. Il devient, en 1998, secrétaire général de ce ministère, fonction qu’il occupe jusqu’en 2002.
De retour à la Banque centrale, il est nommé conseiller. La mission de référence qui lui est assignée est claire : superviser la refonte des manuels de procédures des départements. Il multiplie à nouveau les expériences à la tête des différents services. Après le poste de contrôleur général, il dirige ensuite les services administratifs et juridiques avant de devenir conseiller chargé des questions administratives, des procédures et de l’organisation de la Banque centrale. Sa nomination, en août 2008, au poste de ministre des Mines et de la géologie constitue l’un des moments phares de sa carrière, mais en même temps le plus bref, car il ne put occuper cette fonction que cinq mois, jusqu’en décembre, date à laquelle la junte s’empara du pouvoir puis renversa les institutions.
Poursuivre les réformes
Marié et père de deux enfants, Louncény Nabé est musulman pratiquant. Dans son entourage, ses proches parlent d’un « homme sincère, jovial, à l’écoute de tous, et qui aime le travail bien fait ». Lui ne dit pas le contraire, même s’il l’exprime à sa manière « Dans le cadre du travail, je n’aime pas qu’un collaborateur attende toujours des instructions. J’aime que l’on prenne des initiatives. J’ai toujours fait des propositions à mes supérieurs hiérarchiques aux différents postes où j’ai servis, quand aux mesures à prendre pour rendre le travail beaucoup plus efficient. Je souhaite d’un collaborateur qu’il prenne des initiatives, de là naît l’innovation ». Proche du ministre de l’économie, le banquier est aussi l’un des artisans de l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative PPTE en septembre 2012, permettant l’annulation de 2,1 milliards $ de dettes, ainsi que l’allègement d’autres dettes bilatérales.
Mais en dépit des résultats, il pense que beaucoup reste à faire. Sa vision est de poursuivre les réformes initiées. « Le niveau de départ tétait très dégradé, il serait très présomptueux de dire que tout ce qu’on a prévu s’est réalisé dans les formes, et avec les résultats que l’on a escomptés. Mais nous sommes sur la bonne voie. La situation d’aujourd’hui est bien meilleure et ne peut qu’aller de mieux en mieux ».
« Un soldat au service de son pays »
A 58 ans, corpulence robuste, démarche rassurante, le gouverneur de la Banque centrale ne se sent pas fatigué. Celui qui se considère comme un « soldat au service de son pays », affirme être toujours en mesure de le servir, partout où le devoir l’appelle.
« J’ai plutôt subi l’itinéraire de ma carrière que voulu cette carrière. Les personnes qui m’ont connu et avec lesquelles j’ai travaillé ont pensé à un moment donné que je pouvais être utile à tel ou tel poste et ont fait appel à moi. Je suis prêt à aller partout ».
Mais sur la question de savoir s’il est vraiment tenté par la politique, comme nombre de ses compatriotes, il répond clairement « Quels que soient nos domaines d’évolution, on a ses préférences au plan politique, mais la politique active, c’est du domaine des politiques ».
Source African Banker/Aminata.com
— conakrylemag