« J’ai compris qu’il ne suffisait pas de dénoncer l’injustice, mais qu’il fallait donner sa vie pour la combattre » Albert Camus. Les Guinéens qui continuaient à soutenir encore Alpha Condé , soit parce qu’ils voulaient lui accorder toute sa chance ou croire en sa bonne foi jusqu’au bout, ont compris qu’il ne joindra jamais l’acte à la parole.
Pour lui qui aime se donner en spectacle , bouffon dans l’âme , sans redouter le ridicule, la posture choisie est de promettre, encore et toujours promettre , faisant sienne l’assertion selon laquelle , les promesses n’engagent que ceux qui y croient.
Avec l’ultime espoir déçu du changement annoncé par lui-même dans une version guinéenne très originale des guignols , il faut se résoudre enfin pour les plus sceptiques à admettre qu’il n’est pas l’homme qu’il faut à la place où il se retrouve.
Par un accident de l’histoire et par la faute aussi politique et morale grave d’acteurs de notre transition qui se sont laissés aller à différents sentiments pour le tirer d’un » naufrage électoral » certain.
La rupture que ce président , tout sauf démocratiquement élu, a annoncée urbi et orbi dans son populisme habituel pour créer l’illusion chez les Guinéens qu’il a appris de ses innombrables fautes , s’est révélée encore une vaste escroquerie et supercherie politique , après le braquage électoral réussi. En cette matière et d’autres, nous avons désormais affaire à un multirécidiviste notoire déjà condamnée par l’histoire.
Rien d’étonnant pour un homme qui a un profond mépris pour les guinéens dont il est loin des préoccupations quotidiennes; il ignore tout du peuple de Guinée digne et fier qu’il n’aime pas et se refuse à respecter , aussi bien dans ses déclarations publiques que ses actes officiels. Ni introspection, ni sursaut même tardif pour un homme qui n’a que des certitudes.
Alpha Condé ne se reconnaît pas, ni ne se considère comme le président de tous les Guinéens , trahissant ainsi le serment qu’il a prêté devant la nation.
Il a choisi de diriger sans tenir compte en rien et à aucun moment d’aucun équilibre qui a épargné à la société guinéenne tous les replis et conflits qui la minent de l’intérieur et de l’extérieur aujourd’hui.
Chaque jour qui passe et à toutes les occasions, on se rend compte de l’impossible reconversion en Chef de l’Etat de Alpha l’étudiant frondeur, l’opposant borné, le candidat tricheur ; il est et demeure l’homme d’un clan, le chef d’une tribu , le leader d’un parti au détriment de tout effort quelconque de rassemblement consenti par tous les dirigeants éclairés, patriotes et démocrates du monde pour que leurs pays restent un et indivisible.
Lui, le génie politique, non : ce n’est pas par hasard ou ignorance qu’il continue à diriger le RPG au mépris de notre constitution et de l’éthique républicaine qui lui impose d’être le Président de tous les guinéens et de s’occuper des affaires de la nation , plutôt que de détails sordides comme le fonctionnement de son RPG en chute libre.
Et dire qu’il est prompt à rappeler le respect de l’autorité de l’Etat et des institutions du pays avec le secret espoir d’y trouver le moyen de bafouer les droits et les libertés reconnus aux citoyens. En réalité , peu enclin au débat et à la contradiction qui caractérisent la démocratie, il rêve d’un citoyen guinéen muselé, d’une Guinée résignée au sort qu’il lui fait subir sans regrets ni remords.
Tous comptes faits, Alpha Condé , durant toute sa vie, n’a pensé qu’à conquérir le pouvoir sans trop savoir quoi en faire et maintenant affiche l’obsession à le garder envers et contre tout , au péril de notre nation malmenée depuis trois ans par lui en toute insouciance et sans la moindre peur de ce que lui réserve l’avenir proche et lointain.
Tous unis contre Alpha , seul contre tous
Le nouveau ancien futur gouvernement de démission de toute conscience patriotique et d’omission du peuple de Guinée n’a qu’un devoir qui est son unique but : continuer à voler les élections, voler tout court. Il a révélé l’esprit clientéliste de l’opposant de toujours, incapable de devenir chef de l’Etat un seul jour , engoncé qu’il est depuis qu’il s’est prédestiné au pouvoir dans des intrigues politiques et visées électorales permanentes.
C’est surtout un signal fort pour ceux qui seraient tentés encore de faire confiance en l’homme malgré toutes ses trahisons , de croire en sa loyauté dans l’amitié ou de s’en remettre à ses engagements dans les alliances ou accords politiques toujours fondés sur des nécessités électorales et non des besoins de progrès économique et sociale de la Guinée. Exemple parmi tant d’autres ralliés et nouveaux convertis au Condeisme de Bah Ousmane qui paie le prix fort son soutien épidermique à Alpha Condé.
Ce désormais ancien ministre et sans doute aussi ancien compagnon du professeur a tout perdu, tour à tour jeté en pâture à sa communauté, poussé à brader l’héritage de Siradiou Diallo avec son emblématique UPR devenue l’ombre d’elle-même à cause de lui, avant d’être renvoyé du gouvernement dont Alpha se vantait qu’il est un symbole de diversité et de résistance citoyenne et républicaine à un front peul plus large et unanime contre lui.
A propos de cette obsession ethnique tous azimuts qui le hante et va le perdre, il n’y a aucune volonté de la part de Alpha de voir en chaque Guinéen le citoyen, au lieu de son appartenance ethnique et régionale alors qu’il s’y était engagé avant la tempête dans un verre d’eau du dernier remaniement ministériel.
Au mépris de l’urgence à recoller les morceaux éparses de l’unité du pays et de l’union des guinéens, il a reconduit la répartition ethnique mécanique et absurde des postes de responsabilité de la Guinée, la nôtre à tous même si le Chef de l’Etat , artificier ou kamikaze que se veut Alpha Condé, cherche à se l’approprier indûment , en privant de nombreux guinéens de leurs droits et libertés inaliénables.
Comme prévu dans son agenda connu de chacun et tous à présent, la Primature revient encore et toujours à la Basse Côte, la promesse de la Présidence de l’Assemblée Nationale à la forêt a été tenue.
Une » méthode gagnante » d’isolement des Peuls jugés hostiles que Alpha Condé ne semble pas vouloir changer, avant de se rendre compte que le pays aura du mal même après lui à se relever de cet apartheid et qu’il en sera aussi victime expiatoire. Said Fofana, le dernier des premiers ministres de tous les temps et de tous les Présidents de la Guinée , a si bien compris le fond de la pensée et la finalité de l’action de son mentor qu’il l’imite jusque dans l’absurdité et la bêtise subliminale , étant entendu que la » bêtise insiste toujours » : sa profession de foi après sa reconduction, il ne l’a pas faite devant les nouveaux élus du peuple comme il est de tradition dans une démocratie et république qui se respectent, mais devant ses » supporters » Soussous en pays Soussou dans une prétendue République. Alpha Condé, Président des Malinkés, Said Fofana, Premier ministre des Soussous, Kondiano, Président de l’Assemblée nationale de la Forêt ?
Les peuls, majorité traitée en minorité , et relégués en spectateurs de leur destin et confinés encore dans une fonction de »faire-valoir » de tous les pouvoirs vont-ils continuer à subir cette injustice et discrimination honteuses ?
Laissés sur le bas coté de la République et en marge de la nation, devraient-ils se retirer sur leurs terres pour retrouver la dignité perdue et la représentativité légitime , comme le recommandent des idéologues du régime et tenants irresponsables de l’ethnicisme et de la préférence régionale ,bien représentés du reste dans les différentes sphères du nouveau pouvoir? C’est cela la République d’Alpha Condé, sa version de la Démocratie et l’héritage qu’il entend léguer aux futures générations ?
Heureusement que la communauté même d’Alpha Condé commence à prendre conscience que chaque fois et depuis longtemps il se sert d’elle pour ses desseins personnels lugubres: il l’a braquée contre les Soussous lorsqu’il était opposant à Conté, aujourd’hui il oppose encore cette communauté aux Peuls pour les punir d’avoir soutenu Lansana Conté et aussi à cause de sa rivalité avec sa bête noire politique Cellou Dalein Diallo. A la différence cette fois, en plus des Malinkés, avec la faculté de corruption et d’asservissement du pouvoir conquis, il fait appel aux autres communautés ,y compris les Soussous, ses ennemis d’hier pour abattre le nouvel ennemi Peul.
Et comme il ne connaît pas la longue histoire des brassages et sous-estime la capacité des guinéens à surmonter la tension qu’il contribue à entretenir par la haine de l’autre, de sa politique de diviser pour régner et de stigmatisation des ethnies, il ne croit guère au sursaut national en marche qui l’emportera en 2015 ou avant.
C’est le lieu de rendre hommage au Président du PDN , Lansana Kouyaté qui a montré qu’on peut se mettre au-dessus des ethnies et des régions pour défendre des valeurs et des principes. Dans cette démarche courageuse et pleinement citoyenne se dessinent les contours de la Guinée de demain et le profil du citoyen guinéen nouveau escompté, » detribalisé », fier de sa nation et profondément amoureux de sa patrie.
C’est au prix de ce genre de sacrifices personnels et d’un engagement collectif que se dressera devant nous une République vertueuse , qu’un destin commun sera possible , qu’une démocratie authentique et apaisée émergera.
Enfin, en se fondant sur cette autre réflexion de Camus à savoir que » la vraie générosité envers l’avenir , c’est de tout donner au présent » , il y a lieu dès maintenant d’arrêter Alpha Condé dans sa folle ambition de briguer un second mandat en s’opposant fermement à sa candidature annoncée pour 2015 par une loi de limitation d’âge à la faveur de la session des lois d’Avril qui le frapperait inéluctablement pour lui arrivé au crépuscule de sa Présidence et de sa vie; soit par une puissante mobilisation populaire qui est d’ailleurs le seul langage qu’il comprend jusqu’à maintenant et reste aussi le seul moyen de le dégager: la force doit arrêter la force avant que la maison Guinée ne brûle et que tous les Guinéens se retrouvent sans patrie.
Tibou Kamara www.nouvelledeguinee.com avec AMINATA.COM
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