LA VICTIME : Crois-moi, il n’y a aucun avantage à avoir une grande gueule ici par les temps qui courent. Peut-être est-ce pour sa grande gueule que le père de cette fille que tu cherches s’est vu fermer sa gueule. Parce qu’il avait une gueule trop agaçante. Parce qu’il traçait des lettres trop tranchantes. Parce qu’on n’aime pas par ici les langues trop dérangeantes.
On préfère les équilibristes, les rois du grand-écart à se faire exploser les noix. Et toi, toi petit, toi mon petit, peut-être devrais-tu accepter d’être une petite gueule sans faire la fine bouche. (Il rigole. Le Bourreau sort un marteau et un burin en souriant pour agrandir le trou de son genou. Il hurle de douleur).
LE BOURREAU : Parle, espèce de connard ! Tu crois que je plaisante ? (S’adressant à L’Arbitre) Il croit que je plaisante.
L’ARBITRE : Tu crois qu’il a le temps de plaisanter ? Tu crois qu’il a le cœur à plaisanter ? Tu crois qu’il a l’esprit à s’amuser ? À s’amuser de tes jeux de mots de merde ?
LE BOURREAU : Où elle est ? Tu continues ? Tu continues à ricaner, à me pisser à la raie ? Tu me pisses à la raie comme dans la première des traînées, comme dans la traînée zonarde qui dandine du cul sur un trottoir malfamé.
L’ARBITRE : Arrête, dans ton intérêt, de faire le mariole. Répond à sa question. Arrête de vouloir jouer au plus fin. Il fera pas dans la finesse, dans la dentelle, la subtilité, lui.
LE BOURREAU : Je serais aussi sauvage brutal violent viscéralement violent que vous l’avez été avec elle.
L’ARBITRE : Après l’avoir creusée perforée excavée par des marteaux piqueurs souillés. Son père, qui a monté ce complot contre son père ? Marteau burin 357 Magnum 9mm fabrication Smith & Wesson sont à portée.
LE BOURREAU: Ils sont portés par une détermination sans faille. Par une vengeance qui a eu tout le temps de froidir pour que je la mange. Puisque tu refuses de parler, on va gérer ça autrement, en s’amusant. Une partie de roulette russe, ça te dit ? Puisque tu refuses de parler, laissons le hasard causer à ta place.
L’ARBITRE : Un petit face-à-face avec la mort. Au hasard. Le jeu de la mort et du hasard.
LE BOURREAU : Je te pose une question, on voit si tu peux continuer à tutoyer la mort…
L’ARBITRE : Ou alors tu reconnais tout de suite tes torts…
LE BOURREAU : Peut-être auras-tu un meilleur sort…
L’ARBITRE : Une balle une seule dans le corps et pfft ! Tu dors. (Rires complices entre les deux).
LE BOURREAU : La roulette russe, avec le risque que mon 357 Magnum 9mm fabrication Smith & Wesson soit pointé à chaque fois sur une partie différente de ton corps qui pourrait être explosée comme ta rotule l’a été déjà .
L’ARBITRE : Une balle dans le barillet et le jeu peut commencer.
LE BOURREAU : Première question à UNE balle : Entre une bouteille de Jack Daniel’s, une catin roulée comme une fille fabriquée par sa propre mère, quel est le pire choix qu’un barbu de Daesh doit éviter pour espérer les soixante-dix vierges du paradis ?
EXTRAIT DE « JAMAIS DEUX SANS PROIE ». Texte finaliste du Prix RFI Théâtre 2018, avant le prix obtenu avec LA CARGAISON en 2020.
LECTURE PUBLIQUE À VENIR BIENTÔT!
À LA FIN DU RAMADAN. RESTEZ À L’ÉCOUTE.
PAR CONAKRYLEMAG.COM
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