Atelier anticorruption : la grande hypocrisie du régime Doumbouya

Atelier anticorruption : la grande hypocrisie du régime Doumbouya
C’est dans un hôtel de Conakry, à coups de micros flambants neufs et de formules rodées, que le général Amara Camara, secrétaire général de la présidence, a présidé le lancement d’un atelier de finalisation du rapport d’autoévaluation de la Guinée dans le cadre de la Convention de l’Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption.
Un événement officiel, avec badges, slogans et photo de famille. Une démonstration de bonne volonté ? Non. Une mise en scène. Une opération de communication creuse. Car pendant que certains peaufinent des rapports, d’autres organisent la prédation en silence.
Comment peut-on parler de lutte contre la corruption dans un pays où aucun dignitaire de la transition n’a jamais été inquiété pour enrichissement illicite, alors que le train de vie de certains, en trois ans seulement, s’apparente déjà à celui des satrapes ? Comment évoquer la transparence, quand le budget de la Présidence est un trou noir, où disparaissent des centaines de milliards, sans traçabilité ni justification ?
Le général Doumbouya, autoproclamé champion de la moralisation de la vie publique, n’a jamais publié la moindre déclaration de patrimoine. Il promet l’éthique, mais gouverne dans l’opacité. Il parle de vertu, mais récompense la loyauté, pas la compétence. Et son entourage ? Une armée de nouveaux riches sortis de nulle part, qui jonglent entre contrats publics, marchés attribués de gré à gré, et véhicules de luxe en cortèges interminables.
Cet atelier n’est pas un engagement. C’est une opération de séduction à l’égard des bailleurs de fonds, des partenaires internationaux, de l’Union Africaine elle-même. La Guinée coche les cases. Elle fait semblant d’être sérieuse. Mais dans les couloirs du pouvoir, la corruption n’est pas combattue. Elle est réorganisée. Elle change juste de mains.
L’ancien régime d’Alpha Condé avait ses pillards. Le CNRD a les siens. À ceci près qu’aujourd’hui, ils se drapent dans l’uniforme et parlent au nom de la Nation. Mais les deals continuent. Les pots-de-vin aussi. Le favoritisme, l’impunité, les nominations politiques ? Plus que jamais d’actualité.
La vérité, c’est que la junte veut légitimer son hold-up par la vertu. Elle pense qu’en multipliant les ateliers, les rapports, les déclarations creuses, elle pourra faire oublier qu’elle est arrivée au pouvoir par la force, et qu’elle compte bien s’y maintenir par la ruse.
La corruption ne recule pas. Elle change de visage, de vocabulaire, de méthode. Et tant que la justice restera silencieuse, tant qu’aucun proche du régime ne tombera, tant que les enquêtes viseront toujours les anciens et jamais les actuels, ce genre d’atelier n’aura qu’une seule utilité : maquiller la prédation en réformisme.
La Guinée mérite mieux qu’un rapport d’autoévaluation. Elle mérite un sursaut de courage, une justice indépendante, et une rupture réelle avec le pillage d’État. Pour l’instant, ce n’est pas un atelier contre la corruption. C’est un alibi.
— conakrylemag




