Dans un élan de rhétorique digne d’un monde orwellien, le ministre guinéen du Budget, Lancinè Condé, a décidé de s’aventurer sur les terrains glissants de la justification de la censure. À travers ses propos, on décèle une tentative maladroite de légitimer l’illégitime, comme si museler la presse et brider l’internet était une recette miracle pour apaiser les tensions, plutôt qu’une manifestation évidente de l’autoritarisme.
En se référant au mouvement des gilets jaunes en France pour justifier l’indéfendable, M. Condé semble oublier un détail crucial : la France, malgré ses tumultes, n’a jamais sombré dans la censure numérique généralisée comme solution à ses problèmes. L’argument, au mieux, est un faux équivalent, au pire, une manipulation grossière des faits pour endormir l’esprit critique de son auditoire.
L’argumentaire du ministre du Budget résonne comme une symphonie de la dissonance cognitive. En prétendant protéger la paix et la stabilité sociale, il dévoile plutôt une peur viscérale des voix discordantes. Les « petits coups » qu’il mentionne ne sont, dans son esprit, rien d’autre que l’expression démocratique d’un peuple qui aspire à plus de transparence et de responsabilité de la part de ses dirigeants.
L’ironie de son plaidoyer est palpable lorsque M. Condé fustige la presse internationale, accusée d’inciter au chaos pour ensuite prendre la fuite. Cet argument, dénué de toute nuance, peint une image manichéenne du monde où les médias étrangers sont les seuls responsables des troubles internes de la Guinée. C’est non seulement réducteur, mais aussi profondément hypocrite, car il détourne l’attention des véritables enjeux : une gouvernance qui préfère étouffer les critiques plutôt que d’y répondre.
En somme, les déclarations de Lancinè Condé témoignent d’une vision du pouvoir où la censure est érigée en vertu. Plutôt que d’allumer le feu de la répression, le gouvernement guinéen ferait mieux de tendre l’oreille aux revendications de sa population. Après tout, l’histoire nous enseigne que les flammes de la censure ne font qu’attiser les braises de la résistance.
Par Oumar Sylla pour conakrylemag.com
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