Comprendre comment ça marche !
Lorsqu’une personne depuis le pays des Toubabs vous aide, il ne faut pas penser qu’il est bourré de fric et que c’est ce qui déborde qu’il vous envoie. Il a sacrifié quelque chose pour vous.
Quelqu’un au pays des Blancs peut avoir 1600 euros par mois. Vous convertissez la somme en Francs guinéens, ça vous fait le double du salaire net mensuel d’un ministre ici et ça vous donne le vertige. Il a un loyer de 800 euros à payer. La moitié du salaire est partie.
Il a des factures, eau, électricité, gaz à payer. Au minimum 300 euros. Il reste 500 euros.
Il y a les assurances à payer. Maison, santé, assurance rapatriement de corps en cas de décès, assurance des enfants sur le chemin de l’école. Comptez 200 euros.
Sur les 300 euros restant, nourriture, frais de transport, soins de santé, frais divers.
Vous me demanderez, et les loisirs ? Loisirs, il vous répond, « on n’est pas en Afrique hein ! ».
Et les économies ? Économies, on racle sur tout.
Le loyer, vous ne pouvez pas dribbler le bailleur. C’est un ordinateur qui est à la manœuvre. Le transport, c’est une machine. Allez négocier avec une machine ? Le boulot ? C’est votre seul et vrai chéri. Femme ou homme, vous perdez votre boulot, vous êtes fichu. Vous ne pouvez pas aller manger chez le voisin. Le voisin, il a ses propres problèmes.
Il fait très froid dehors. Vous n’avez pas de gaz, pas d’électricité, votre maison devient un frigo. Si vous ne payez pas les factures, vous allez payer l’hôpital.
Pour les vacances au pays, on économise sur toutes les dépenses. Puis on prend un crédit à la banque.
Avec tout ce que je viens de décrire, quelqu’un vous demande de l’aide. Vous dites de patienter. Il se met à vous téléphoner matin, midi et soir. Vous en avez marre de ce harcèlement, et vous l’envoyez balader. Il vous en veut. Comme si vous aviez son crédit. Comme s’il vous avait aidé à travailler.
Un parent vous appelle à la fin du mois pour vous dire bonjour. Il ne se rend pas compte à quel point il vous insulte. Vous n’existez donc qu’au moment des salaires. Vous rompez toute relation avec lui. Il vous en veut.
Vous avez l’habitude d’aider un proche. Il y a une urgence dans la famille. Vous pensez qu’il va comprendre et passer son tour. Vous avez tout faux. Il vous téléphone sur le ton d’une réclamation. Fatigué de ses mauvaises manières, vous l’envoyez balader. Il oublie tout ce que vous avez fait avant. Et devient un ennemi juré.
Et tout cela n’est rien. Ceux qui sont au pays et qui ont le malheur d’avoir un salaire subissent pire. Et, pour eux, la pression est constante. On prend les problèmes de 100 personnes, et on met sur la tête d’une seule personne.
Ne vous fâchez pas ! J’écris de la science-fiction. Un peu comme nos contes qui disent des situations qui n’ont jamais eu lieu. Ces situations ne peuvent pas être réelles, voyons !
— conakrylemag