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Mamadi Doumbouya « Kankélenti » – « Un homme de parole. »

Mamadi Doumbouya et l’épreuve de la parole donnée : sept raisons qui rendent sa candidature impossible

En Guinée, la politique n’est pas seulement une affaire de textes et de décrets : elle se joue aussi dans la mémoire collective, les symboles et les serments prononcés devant un peuple trop souvent trahi. Aujourd’hui, à l’heure où la nouvelle Constitution s’apprête à être soumise à référendum et où les rumeurs de candidature de Mamadi Doumbouya enflent, la question cruciale n’est plus technique mais morale : peut-il se présenter sans violer le contrat sacré qu’il a passé avec la nation le 5 septembre 2021 ?

Ibrahima Diallo, figure du FNDC, résume en sept points ce qui devrait clore ce débat. Mais au-delà de ces arguments, l’analyse politique révèle un enjeu bien plus profond : celui de la crédibilité de l’État guinéen et de la survie même de la parole publique dans un pays meurtri par des décennies de promesses bafouées.


1. Un coup d’État justifié au nom de la démocratie

Le 5 septembre 2021, Mamadi Doumbouya renversait Alpha Condé. Le motif ? Mettre fin à un troisième mandat contesté, source de division et de violences, et restaurer l’ordre constitutionnel avec un civil élu à la tête de l’État. Cette justification reste inscrite dans la mémoire collective. Si, après avoir dénoncé un président accroché au pouvoir, il choisissait lui-même cette voie, ce ne serait pas seulement une contradiction : ce serait une trahison politique et historique.

Ce coup d’État avait été présenté comme un sacrifice patriotique. Le transformer en tremplin personnel serait le plus grand désaveu de ce récit fondateur.


2. Un serment solennel devant la nation et le monde

Dès les premières heures de la transition, Doumbouya avait pris un engagement clair : ni lui, ni aucun membre des organes de la transition ne serait candidat. Un serment prononcé devant la nation entière et relayé par les chancelleries internationales.

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En Guinée, la parole donnée n’est pas un détail administratif. Elle est une valeur cardinale. Rompre un serment public, c’est fracturer un lien moral entre un dirigeant et son peuple. Même ceux qui aujourd’hui murmurent à l’oreille du président savent qu’une telle volte-face effacerait en un instant le peu de confiance qui subsiste entre le pouvoir et les citoyens.


3. Une charte gravée dans le marbre

Ce n’était pas qu’un discours : l’engagement a été inscrit noir sur blanc dans la Charte de la Transition. Doumbouya y a prêté serment devant le président de la Cour suprême, la main posée sur ce texte censé servir de boussole à la transition. Si ce serment devient optionnel, si cette charte peut être piétinée par celui-là même qui l’a jurée, alors plus aucun texte n’aura de valeur dans ce pays.

C’est toute la crédibilité des institutions guinéennes qui serait sacrifiée sur l’autel d’une ambition personnelle.


4. La candidature de Doumbouya, un poison pour toute Constitution

Diallo touche juste : aujourd’hui, le problème n’est pas tant la Constitution que le contexte. Même un texte parfait serait discrédité si son premier effet était de légitimer la candidature d’un homme qui avait juré de ne jamais se présenter.

Dans un pays où les constitutions sont trop souvent des outils taillés sur mesure pour le pouvoir en place, ce scénario renforcerait l’idée que les lois ne sont que des armes au service des ambitions personnelles. Et ce poison-là détruit toute notion d’État de droit.


5. Le poids sacré de la parole en Guinée

Dans les sociétés guinéennes, la parole donnée est un contrat moral plus fort que l’écrit. Les proverbes cités par Ibrahima Diallo en disent long :

  • En poular : « Dimo ko kon’ngol, Naggê ko boggol » – « L’homme digne se reconnaît au respect de sa parole, comme la vache suit celui qui tient sa corde. »
  • En malinké : « Kankélenti » – « Un homme de parole. »
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Ces maximes ne sont pas folkloriques : elles fondent la légitimité d’un homme public. Si Mamadi Doumbouya renie son serment, il ne perdra pas seulement une élection hypothétique, il perdra son honneur et la considération même de ceux qui prétendent aujourd’hui l’aimer.


6. L’honneur d’un homme et la confiance d’un peuple

L’histoire regorge de dirigeants qui ont cru pouvoir tromper leur peuple en brisant leurs promesses. Peu ont survécu politiquement. Car au-delà des calculs stratégiques, il y a une vérité universelle : un homme qui ne respecte pas sa parole cesse d’incarner l’État. Et sans incarnation digne, l’État s’effondre.

Même ses partisans les plus fidèles ne pourront défendre l’indéfendable : un président qui s’était présenté comme un « réparateur » et qui finirait par reproduire les pires travers de ceux qu’il a renversés.


7. Les fantômes de Dadis et d’Alpha Condé

La Guinée n’a pas besoin de nouveaux traumatismes. 2009 : les velléités de candidature de Dadis Camara plongent le pays dans le chaos et le sang. 2020 : le troisième mandat d’Alpha Condé fracture la nation et ouvre la voie au coup d’État. Rejouer ce scénario avec Doumbouya, c’est préparer une nouvelle décennie de crises.

Ibrahima Diallo a raison de rappeler cette mémoire vive : chaque violation de la parole donnée en Guinée se paie en instabilité et en sang.


Un test moral plus qu’électoral

Au fond, la question n’est pas de savoir si Mamadi Doumbouya peut gagner une élection. La question est : la Guinée peut-elle se permettre qu’il s’y présente ? Ce débat dépasse les partisans et les opposants. Il touche à la survie même de l’idée de contrat social.

La candidature éventuelle de Doumbouya ne serait pas seulement un choix politique : ce serait un acte fondateur, un signal envoyé au pays tout entier. Le signal que la parole publique ne vaut plus rien. Que les serments peuvent être reniés. Que les constitutions ne sont que des accessoires de pouvoir.

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Analyse : le piège du pouvoir et l’illusion de l’impunité

En tant qu’observateur de la scène politique guinéenne, on ne peut ignorer une réalité : le pouvoir transforme les hommes. Ce qui, en 2021, semblait un engagement sacré peut, en 2025, paraître à Doumbouya et à son entourage comme un détail contournable. Le syndrome du « sauveur indispensable » rôde déjà : l’idée que lui seul pourrait garantir la stabilité, que lui seul incarne l’avenir.

Mais ce récit est dangereux et mensonger. Aucun homme n’est indispensable à une nation. La stabilité ne se construit pas sur un individu, mais sur des institutions solides et une confiance collective.

Si Doumbouya cède à la tentation de la candidature, il rejoindra la longue liste des dirigeants africains qui ont cru que leur serment pouvait être effacé par un décret. Et la Guinée, encore une fois, en paiera le prix.


Un choix qui définira l’histoire

Aujourd’hui, la balle est dans son camp. Il peut honorer sa parole et inscrire son nom dans l’histoire comme celui qui a ouvert la voie à une véritable alternance. Ou il peut succomber à l’appétit du pouvoir et devenir un nouveau symbole de la trahison politique.

Dans les deux cas, ce choix marquera durablement la Guinée. Car dans ce pays où l’on pardonne beaucoup, il est une chose que l’on n’oublie jamais : la parole donnée… et trahie.


Une analyse de l’article d’Ibrahima Diallo FNDC revisiter par notre rédaction

PAR CONAKRYLEMAG.COM

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