Politique

Interview Mme Aissatou Billy Sow

 

– Madame, vous avez été élue Secrétaire Générale du RAFESI, quels sont vos sentiments en tant que Chercheure guinéenne?

Pour commencer, merci aux uns et aux autres pour les félicitations reçues via facebook, twitter ou d’autres canaux. Ceci dit, pour répondre à votre question, je suis fière et honorée en tant que femme chercheur, guinéenne et africaine. Après Le Prix Sunny Design que j’ai obtenu lors de la COP 21 à Paris, le Prix d’ Excellence du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, je me dis que mon travail et mon investissement sur les problématiques générales du genre et développement commencent à avoir une reconnaissance et une certaine visibilité.

Mais au-delà de ma propre personne, c’est surtout la communauté scientifique féminine, encore peu visible dans notre pays, que j’honorerai à mon tour.

– Qu’est ce qui a prévalu à votre élection?

Pour rappel, le thème de l’Atelier de Ouagadougou était  » Utilisation des énergies renouvelables dans une approche intégrée », ce qui signifie que j’étais vraiment dans mon élément avec mon expérience professionnelle et mon intérêt pour les questions de développement durable en lien avec les problématiques environnementales et le genre. Je rappelle que je suis titulaire d’un DEA en Energétique et Environnement.

Ma communication a porté sur un projet que j’avais mené à Tambama, un petit village de Kindia, sur la construction de digesteurs de biogaz et son utilisation pour l’accès du village a l’éclairage et à l’énergie domestique. Je suppose également que ma participation et mon implication pour la réussite de l’Atelier fait peser la balance en ma faveur.

– Après cette élection, quels sont vos projets pour une transition écologique en Afrique de façon générale et spécifiquement en Guinée?

Vous n’étes pas sans savoir que l’une des finalités de la recherche scientifique, surtout dans les pays en développement comme le notre, c’est d’apporter des solutions novatrices et efficaces aux problèmes de développement des populations. Aussi, avec la crise pétrolière et surtout les problèmes du changement climatique, l’option de la transition énergétique vers les énergies renouvelables en Afrique, et ce, surtout que nous disposons de ressources incommensurables pour l’énergie solaire, l’hydroélectricité, l’énergie éolienne etc.

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Mieux, nous savons tous aussi que les premiers bénéficiaires de l’accès à l’énergie sont les femmes, notamment les femmes rurales qui mettent des heures pour avoir accès à l’eau et au bois de chauffe. Donc, pour repondre à votre question, en Guinee, je vais continuer mes activités de recherche sur le terrain, en proximité avec les populations rurales, les femmes rurales en particulier, pour accompagner des projets de développement qui mettent l’accent aussi bien sur l’atténuation que sur l’adaptation face au changement climatique, notamment les énergies renouvelables.

C’est dans ce cadre d’ailleurs, que rentre mon projet de création d’un centre de renforcement des capacités des jeunes et des femmes à Popodara (Labé). A travers ce centre, j’espère impacter la vie des populations voisines grâce à leur appropriation des foyers améliorés, du compost, du photovoltaïque, des séchoirs solaires, etc.. J’espère ainsi mieux mobiliser dans ce sens la communauté scientifique guinéenne, sous régionale et africaine. Je pense que si nous voulons aller de l’avant dans le domaine de l’environnement, il faut d’abord agir local.

– Dites nous quels sont les domaines d’intervention du RAFESI de manière générale et quel est son impact sur le monde scientifique guinéen dormant?

La mission du RAFESI est de servir de cadre global de concertation et d’échanges d’expériences, d’informations et de partenariat entre ses membres, avec d’autres réseaux nationaux, sous régionaux, régionaux et internationaux pour toutes questions relatives à la promotion d’une culture scientifique et technologique pour les filles et les femmes.

Si on prend l’exemple sur la Guinée dont le pourcentage des filles dans les universités restent faibles, et beaucoup plus dans les filières techniques même si on parle de progrès. Selon le Document de Stratégie de Développement de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique le taux d’accès des filles dans les Institutions d’Enseignement Supérieur en 2013/2014 était de 28, 87 % et de 9,16% dans les filières scientifiques et techniques.

Selon la même source, la proportion des enseignantes-chercheures en 2013/2014, était de 6,2% et de 2,36 dans les filières scientifiques et techniques avec une proportion de femmes ayant le doctorat beaucoup plus faible, 5,4%.

Au vu de ce qui précède, vous conviendrez avec moi qu’il ya un travail à faire à ce niveau et c’est là qu’intervient le RAFESI pour jouer un rôle de lobbying et de plaidoyer auprès de tous les acteurs, le Ministère en premier lieu ainsi que tout le gouvernent, mais aussi les institutions d’enseignement, les organisations de la société civile, le secteur privé, les PTF etc. en vue de la promotion de l’éducation scientifique et technologique des filles et des femmes.

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Par exemple lors de l’Atelier sur  » Utilisation des énergies renouvelables dans une approche intégrée », des chercheurs sont venus présenter leurs résultats qui, s’ils sont diffusés pourraient résoudre certains problèmes de développement que nous avons en Afrique et donc, le réseau peut aussi servir d’interface entre les chercheurs et les gouvernements.

Les participants à cet atelier nous ont demandé d’être leur porte parole auprès des gouvernements africains pour une meilleure prise en compte des résultats de recherche.

– Que fait le RAFESI pour briser les barrières psychologiques et sociales qui empêchent les filles et les femmes de l’Afrique d’embrasser les filières scientifiques?

Avec le travail d’information, de promotion et de sensibilisation des filles et des femmes, le RAFESI espère renverser la tendance c’est à dire avoir un taux élevé de filles dans les filières techniques et un grand nombre de femmes scientifiques et ingénieurs. Evidemment, le RAFESI ne peut pas à lui seul inverser la tendance.

La volonté politique doit être la pour briser certaines barrières, et l’initiative du département d’organiser la journée de remise du Prix d’Excellence va dans ce sens. Mais ce sont tous les autres acteurs qui doivent également s’impliquer, les familles, les élèves, les communautés, les médias, les institutions républicaines, pour briser ces barrières.

Le mot de la fin:

Je fais mien le mot de Kofi Anann, ancien Secrétaire Général des Nations Unies :« … L’éducation des filles est le meilleur outil de développement qui soit ». Alors mobilisons nous tous ensembles, pour des actions concrètes sur le terrain, au-delà des discours de sensibilisation.

Interview réalisé par le Service de Communication et Relations Publiques/MESRS

PAR CONAKRYLEMAG.COM

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