
L’alternance. Quel rêve ? Nous en parlons comme si nous étions déterminés à changer de monde. Il suffit de bien revisiter la politique pour réaliser, qu’il existe toujours sur cette terre, un groupe d’hommes et de femmes qui décident. Lorsqu’on veut changer, il faut absolument comprendre ce qu’on veut remplacer et par quoi. Ce lundi, nous nous invitons non pas dans l’histoire, puisqu’elle est ce qu’elle est, mais dans des réalités.
La Guinée est à sa troisième république. Dans les faits, c’est comme si nous étions dans la première. La démocratie ne s’est pas améliorée. Elle a juste été baptisée par les intellectuels qui ont la maîtrise de la métaphore. Démocratie, s’entend élections. Nous nous contentons donc de les organiser. Sans doute, le chef reste le chef. Le président de la République reste le véritable maître, pas de décentralisation des pouvoirs. D’ailleurs les opposants sont bien d’accords avec. Ils acceptent même que le gestionnaire des collectivités locales, soit le ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation. Quel leader politique est prêt à rompre avec cette pratique ? Il ne s’est pas encore révélé. Tous ou presque gèrent leurs partis, comme le président gère le pays.
La Guinée s’apprête à renouveler son parlement. Les élections devraient se dérouler dans les conditions souhaitées par le chef de l’Etat. C’est bien lui qui décide en dernier ressort, comme Lansana Conté hier et comme Sékou Touré avant-hier. Alpha Condé n’a donc rien inventé, il est dans la continuité, c’est pourquoi ils travaillent avec les hommes de confiance de son prédécesseur pour mieux asseoir le système qu’il faisait semblant de dénoncer. Sékou Touré et Lansana Conté demeurent en Alpha Condé et Mandela n’a pas trouvé sa place.
Lorsque nous sommes étonnés, voyons bien autour de nous. En Côte d’Ivoire, l’ombre de Félix Houphouet Boigny est encore présente à tous les niveaux. Au pouvoir et à l’opposition. Les dirigeants peuvent se démarquer par le travail, comme Ouatara l’a fait jusqu’ici. Au Sénégal, ce sont les anciens ministres qui se transmettent le pouvoir. Diouf à Wade. Wade à Macky, tous héritiers de directs ou indirects de Senghor. Même au Libéria, Georges Weah a bien été contraint de composer avec l’épouse de l’ex chef de la rébellion et Président Taylor, pour arriver à ses fins. Au Mali, c’est bien un ancien ministre de Konaré et proche d’Amadou Toumany Touré qui dirige. Au Burkina et c’est là, les révolutions ont leurs limites, c’est un ancien ministre de Compaoré, fils d’un ancien ministre de Maurice Yaméogo qui a bénéficié des retombées de la bataille du balai citoyen.
Alpha Blondy ne s’est pas trompé. Il n’y a rien de nouveau sous le soleil. Il n’ ya pas de changement au Congo Brazzaville depuis des ans. Tout comme il n’y en a pas en République Démocratique du Congo. Là-bas, le fils de l’ancien chef rebelle Kabila qui a chassé le dictateur Mubutu, a passé le pouvoir au fils de l’ancien ministre de l’intérieur de Mubutu. Et les africains osent demander aux Bongo et Eyadema fils de partir.
Le combat pour l’alternance, ne peut être gagné en Afrique dans ces conditions. La jeunesse africaine doit d’abord définir une alternative. Autrement, les mêmes continueront à régner sur le continent, avec les mêmes pratiques.