Dans les pays très avancés en matière de démocratie, l’alternance peut se faire à travers une élection libre et transparente. Dans ces pays, le fichier électoral n’est pas corrompu. Il ne contient ni doublons ou triplons ni fictifs ou mineurs. L’organe en charge de la gestion des élections n’est pas inféodé au pouvoir.
Il n’existe certes pas de limitation de mandats en Allemagne ou en Israël, les pays que les partisans de la présidence à vie aiment citer dans leur argumentation. Mais les électeurs allemands ou israéliens peuvent provoquer une alternance à travers leurs bulletins de vote. Et il n’y a aucun risque que leur volonté exprimée à travers les urnes soit altérée. Dans ces pays, l’administration est totalement dépolitisée et le principe de la neutralité du service public est une réalité.
On est loin de cette réalité dans nos pays. C’est pourquoi, l’alternance ne peut se faire que par la consécration constitutionnelle et le respect du principe de la limitation du nombre de mandats. Les exemples de l’Allemagne et d’Israël relèvent donc de la naïveté ou de la mauvaise foi tout court.
La démocratie ne se résume pas à l’alternance mais sans alternance la démocratie n’est qu’une démocratie factice. Si la démocratie est le pouvoir du peuple, aucun peuple n’est condamné ad vitae eternam à avoir les mêmes dirigeants. Tout peuple a des aspirations profondes au changement. Dès lors, il n’y a pas de véritable démocratie sans alternance.
L’alternance est si fondamentale en démocratie que la Charte Africaine de la Démocratie, des Élections et de la Gouvernance que la Guinée a ratifiées indique en son article 23 que tout amendement ou toute révision des constitutions ou des instruments juridiques qui portent aux principes de l’alternance démocratique est considéré comme un changement inconstitutionnel de gouvernement au même titre qu’une prise du pouvoir par les armes.
En Guinée, certains diront que l’on n’est pas dans ce cas figure puisqu’il s’agit ici non pas d’un amendement ou d’une révision de constitution mais d’un changement de constitution. Mais le résultat est en réalité le même.
C’est moins la nécessité de doter la Guinée d’une nouvelle qui motive ce projet que les effets qu’il entraîne c’est-à-dire la possibilité d’invoquer, en cas d’adoption de la nouvelle constitution, le principe de non- rétroactivité de la nouvelle loi.
En clair, remettre le compteur à zéro.