SATIRE À VUE :
UN ÉLÉPHANT ÇA TROMPE…
Il y a de cela quelques années, un groupe de demoiselles de nuit se tenait non loin du centre émetteur de Kipé et commentait une défaite du Syli national. L’une d’entre elles, d’un air moqueur, s’exclama en parlant des joueurs : « Ils ne peuvent même pas aligner deux passes » !
On l’a entendu et lu maintes fois, l’équipe nationale de football de la Guinée est aussi imprévisible qu’un éléphant à la parade. Capable du meilleur comme du pire. On ne sait jamais à quoi s’attendre : vous pariez sur sa défaite, elle vous surprend en triomphant ; vous êtes convaincus qu’elle écrasera un adversaire, elle s’effondre lamentablement, vous laissant bouche bée !
Dans un océan de critiques acerbes, qui relèvent souvent de la malveillance, le coach Kaba Diawara et ses pachydermes n’inspiraient pas beaucoup d’optimisme avant le coup d’envoi de la 34e édition de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN). Il est vrai que le monde du football guinéen était plongé dans une atmosphère des plus toxiques, notamment en raison de la crise liée à l’élection d’un nouveau comité exécutif de la Fédération Guinéenne de Football. De plus, les souvenirs des campagnes précédentes, dont certaines furent catastrophiques, hantaient encore les esprits.
Mais ô surprise ! Depuis le début de la CAN éburnéenne, le Syli a dribblé plus d’un observateur ou analyste. Aujourd’hui, ils sont nombreux à penser que cette fois-ci sera la bonne pour décrocher le graal, ou du moins atteindre les demi-finales, voire la finale.
Déjà, ce qui semblait être un plafond de verre (une victoire dans un match à élimination directe) a été franchi. À la clé, un palier jamais atteint depuis 1976 : les quarts de finale dans une CAN à 24 équipes. Ce qui en l’occurrence marque une progression par rapport aux éditions avec 16 participants où on accédait aux quarts dès après les phases de poule.
Il faut d’ailleurs rappeler qu’avec la formule adoptée lors de la CAN jouée au pays du Négus en 1976, il ne pouvait y avoir de match à élimination directe. Avec deux poules de quatre équipes, les deux qualifiées de chacune se retrouvaient dans un tournoi final à l’issue duquel le pays totalisant le plus de points était déclaré champion d’Afrique. Arrivée deuxième, la Guinée devint vice-championne derrière le Maroc (déclaré vainqueur), suivie du Nigeria et de l’Egypte.
Grâce à la détermination des joueurs, la persévérance du sélectionneur Kaba Diawara et le soutien inconditionnel de leurs compatriotes, une nouvelle page de l’histoire du football guinéen vient d’être écrite. Que les critiques aient contribué ou non à ce retournement de situation, l’impact positif rejaillira sur la nouvelle fédération, sur le ministre des sports et aussi sur l’image du « seul maître à bord après Dieu ». On se souviendra toujours que c’est en leur temps que cela s’est produit…
Espérons maintenant que le Syli ne s’arrêtera pas en si bon chemin. Il aura d’abord affaire aux Léopards, qui semblent aujourd’hui moins féroces mais qui ont marqué le football africain à une certaine époque, lorsque le pays s’appelait Zaïre. Avec des talents mémorables tels que Lobilo, Mayanga, Kibongué et autres Mutumbila Santos… Vivement les prochains barrissements victorieux ! Et surtout, que l’éléphant use de sa trompe dans le bon sens pour ne pas nous tromper (encore) dans les jours à venir.
Top Sylla
— conakrylemag