Afrique

L’insubmersible Jacob Zuma a fini par couler

Il s’est accroché jusqu’au bout mais la pression de son parti était trop forte. Réputé indéboulonnable, le président sud-africain Jacob Zuma a été contraint mercredi de démissionner, piètre épilogue d’un règne de dix ans éclaboussé par les scandales de corruption.

Au terme de plusieurs semaines d’un combat acharné avec la direction du Congrès national africain (ANC), le chef de l’Etat, 75 ans, a fini par capituler, sous la menace d’un vote de destitution.

Porté à la tête du pays en 2009 par l’espoir d’un changement en faveur des plus défavorisés, il s’en retire sous les huées.

« Il ne fait aucun doute que l’opinion publique est largement favorable au départ de Jacob Zuma », a résumé à l’AFP l’analyste politique Abdul Waheed Patel, « il a été un boulet pour le pays, pour l’économie et pour son propre parti ».

Triste bilan, que Jacob Zuma, entêté et provocateur, a jusqu’au bout balayé d’un revers de main.

« Je ne suis pas d’accord (avec la décision du parti de me forcer à partir) car il n’y a aucune preuve que j’ai fait quoi que ce soit de mal », a-t-il lancé mercredi soir lors de sa dernière allocution.

Rebaptisé le « président Teflon », tant les accusations ont glissé sur lui, Jacob Zuma a fait pendant longtemps figure de miraculé.

Son arrivée à la tête de l’ANC est un modèle du genre.

Fin 2007, il réussit à évincer de la direction du parti Thabo Mbeki qui l’avait limogé de la vice-présidence du pays deux ans plus tôt à cause, déjà, d’accusations de corruption.

Quelques mois plus tard, il se venge en obtenant la tête de son rival, contraint de quitter son poste de chef de l’Etat.

– Scandales –

Juste avant les élections générales de 2009, la justice renonce – très opportunément s’indignent ses rivaux – à poursuivre M. Zuma, accusé d’avoir touché des pots-de-vin lors d’un contrat d’armement avec, entre autres, le Français Thales. Après la victoire de l’ANC, il devient président du pays.

Trois ans plus tôt déjà, le futur chef de l’Etat avait été acquitté au terme d’un retentissant procès pour viol.

Homme de réseaux, tacticien éprouvé et, surtout, doté d’un « nez » politique particulièrement fin, Jacob Zuma a réussi à naviguer entre les écueils et les déboires tout au long de sa carrière.

Même en 2016, qui fut pourtant son « annus horribilis ».

Cette année-là, le président est d’abord reconnu coupable d’avoir violé la Constitution pour avoir fait payer par le contribuable des travaux de modernisation dans sa résidence privée. Il est contraint d’en rembourser près d’un demi-million d’euros.

L’ANC réalise ensuite aux municipales son plus mauvais score national depuis l’avènement de la démocratie en 1994.

Puis c’est un rapport officiel qui met en cause ses relations controversées avec une riche famille d’hommes d’affaires d’origine indienne, les Gupta. Et la justice pourrait très prochainement relancer ses poursuites dans l’affaire Thales…

Menacé de toutes parts, le président a toujours résisté. Aux motions de censure à répétition de l’opposition comme aux frondeurs qui se sont ligués contre lui au sein même de l’ANC.

Né le 12 avril 1942, l’ancien vacher autodidacte est le premier chef d’Etat officiellement polygame du pays.

– Fausses promesses –

Marié six fois, il a quatre femmes et une vingtaine d’enfants. Il est en outre divorcé de l’ex-patronne de l’Union africaine (UA) Nkosazana Dlamini Zuma, dont il a soutenu la candidature à sa succession à la tête de l’ANC en décembre 2017.

Fier de ses origines zouloues, grand danseur et remarquable chanteur, la bonhomie du sourire masque chez Jacob Zuma une patience de prédateur, affinée dans les geôles de l’apartheid.

Jeune homme, il a passé dix ans au bagne de Robben Island, au large du Cap (sud-ouest), avec Nelson Mandela. Il s’y découvre, accessoirement, une passion pour les échecs.

Une fois libéré, Jacob Zuma dirige la mise en place des structures clandestines de l’ANC dans sa région d’origine, avant de prendre le chemin de l’exil. Il y dirige les services de renseignements de l’organisation à la fin des années 1980.

Après la légalisation de l’ANC en 1990, c’est le retour en Afrique du Sud. Cadre du parti, il participe aux négociations qui mènent aux premières élections démocratiques de 1994 et à la victoire de son parti et de l’icône Nelson Mandela.

Une fois l’ANC au pouvoir, « JZ » devient ministre provincial au KwaZulu-Natal (nord-est), puis vice-président de la République en 1999 jusqu’à son limogeage en 2005.

Sa traversée du désert n’est que de courte durée.

Il prend le pouvoir en s’appuyant sur l’aile gauche de l’ANC et les syndicats. Il incarne alors les espoirs de promotion des plus pauvres. « C’est un homme du peuple », a résumé le chef de la plus grande centrale syndicale du pays (Cosatu), Sdumo Dlamini.

Dix ans après, ses promesses de réformes « radicales » n’ont que rarement dépassé le stade du discours.

« Je ne suis pas un parangon de vertu », a convenu Jacob Zuma en quittant ses fonctions mercredi soir, mais « j’ai servi le peuple d’Afrique du Sud de mon mieux ».

PAR CONAKRYLEMAG.COM

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