Justice et Droit

ACCORDS POLITIQUES DU 12 OCTOBRE 2016 : VERS UNE REVISION CONSTITUTIONNELLE ?

Depuis l’accord politique du 12 octobre 2016, il est question de modifier le code électoral guinéen pour y ancrer les « stipulations[1] » du dialogue politique. Que contiennent donc les conclusions de ce dialogue sur le cas spécifique des élections communautaire, à savoir, les districts et quartiers ?

En effet, les parties au dialogue ont opté pour l’organisation unique des élections communales : les conseils de quartier/district, seront composés au prorata des résultats obtenus dans les quartiers/districts par les listes de candidatures à l’élection communale.

Quand aux présidents de quartier/district, ils seront désignés par l’entité dont la liste est arrivée en tête dans ces quartiers/districts aux élections communales. Autrement dit, les représentants du peuple au niveau communautaire (districts comme quartiers), ne seront pas des élus, mais choisis par les partis politiques, sachant par ailleurs que le code électoral précise qu’ils ne peuvent provenir ni des partis politiques, ni à des ONG.

Ainsi donc, non seulement le code électoral est susceptible de modification pour intégrer ces accords concoctés au sein de la classe politique, mais c’est en plus un droit de vote ôté aux citoyens, ô combien important dans un système qui se veut démocratique.

On peut modifier la loi pour instaurer un système d’élections, l’inverse constitue une régression vis-à-vis de la bourse aux valeurs démocratiques : dire qu’on va supprimer le vote des citoyens dans un domaine aussi important que les élections communautaires, le droit d’élire des représentants qui interviendront au plus près de leur vie quotidienne …

Peut-on modifier le code électoral sans modifier la Constitution ? Posons le texte constitutionnel comme point de départ. Les collectivités locales sont les régions, les communes urbaines et les communautés rurales (art. 134 al. 2 de la Constitution). Lorsqu’on se réfère au code guinéen des collectivités locales de 2006, en son article 6, il est écrit (art.3 al. 2) : « les quartiers et les districts sont des sections des Communes urbaines (C.U.) et des Communautés Rurales de Développement (C.R.D.) ».

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(A noter que la Constitution du 7 mai 2010 ne distingue plus que les C.U et les C.R.). Ces différentes types de collectivités locales ainsi identifiées, il reste à invoquer le principe de la « libre administration des collectivités locales par des élus », consacré dans le texte constitutionnel, en son article 136 al. 2 qui dispose que les collectivités locales s’administrent librement par des conseils élus sous le contrôle d’un délégué de l’État qui a la charge des intérêts nationaux et du respect des lois.

En conséquence, étant donné que la Constitution pose le principe de l’administration des collectivités locales « par des élus », et que les quartiers et districts sont comptés parmi les collectivités locales, il devient impossible de modifier le code électoral sans modifier la Constitution.

Pour ainsi imposer la simple désignation des représentants par les partis politiques plutôt que leur élection au suffrage universel, au niveau des quartiers et districts, on ne saurait procéder sans modifier la Constitution, à moins d’installer définitivement les Guinéens dans une instabilité juridique chronique, inextricablement incompréhensible, et symptomatique de notre sous-développement. D’où la question de savoir, s’chemine-t-on vers une révision constitutionnelle ?

Les protagonistes de l’accord du 12 octobre en sont-ils conscients ? En tout état de cause, de telles révisions ne sont jamais à l’abri de cavaliers constitutionnels[2], entendez par là l’inscription dans un éventuel référendum de modification constitutionnelle, d’un certain nombre de questions qui n’étaient pas tout à fait à l’origine des problématiques débattues encore en 2016.

N.B. : Art. 98 du code électoral révisé : Conformément aux dispositions de l’article 134 de la Constitution, qui dispose que « la création des collectivités locales et leur organisation relèvent du domaine de la loi ». Les districts et les quartiers sont des sections des collectivités locales.

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A ce titre, elles s’administrent par des conseils élus. NOTES : [1] Du latin « stipulari », qui signifie promettre. [2] Comme en Finances publiques, dans le cas des cavaliers budgétaires, le fait d’inscrire un certain nombre de dépenses inutiles, qui viennent grever le budget de l’État et remettre en cause le principe de sincérité budgétaire.

PAR CONAKRYLEMAG.COM

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