Les perles de sankara

Aujourd’hui, j’ai envie de foutre mon pied au foot.

C’est pas que j’aime pas regarder de temps à autre un bon match, cela va de soi, devant une bonne bière. Ce qui me dérange, en vérité, c’est que le ballon rond, qui n’est qu’un simple jeu, soit devenu une religion, comme me le rappelait mon ami Tabouna Sylla. On en fait trop. Surtout en Afrique. Rappelez-vous Sékou Touré. Ses joueurs déconnent, il les enferme. Au gnouf, comme de vulgaires criminels. Ils ont volé ? Tué ? Non, juste perdu un match.

Et si on les pendait, ces petits salopards ? Je suis sûr que cette idée effroyable a effleuré l’esprit malsain de quelques supporters en mal d’émotion.


Regardez à Lagos : les Nigérians marquent, c’est la révolution. Les Nigérians perdent, c’est l’émeute. Les flics sont obligés de matraquer. Il y a du sang partout. 


Les Super Eagles sortent avec leurs gardes du corps, tellement ils ont peur de leur public. Le foot est devenu violent, méchant. Sur le terrain, on voit des coups de coude à la face, des coups de latte dans le plexus, des coups de tête à la Zidane ou des morsures de vampire à la Souarez. Entré en religion, le foot ressemble désormais à du karaté. Bientôt, on ne dira plus Guinée contre Sénégal mais Wang Yu Bangoura contre Shaolin Fall.


Le foot, ça ne rend guère intelligent. Je ne parle pas de ceux qui jouent. Les gars en short, on ne leur demande pas d’écrire des bouquins. Ils ont une bonne excuse. Leur truc à eux, c’est le sport. Je cause de ceux qui regardent. Ils n’y connaissent rien, n’ont jamais pratiqué. Ils sont grassouillets, essoufflés, sportifs comme moi je suis sobre. Mais ils critiquent, ils insultent. L’entraîneur ne peut être que mauvais. L’arbitre est forcément corrompu. L’adversaire est de toute façon un salaud.


Et puis, les politiques s’en mêlent. Ouattara a mis des milliards sur la table pour que ses Eléphants se distinguent à la CAN. Normal, dans la plupart des cas, on pense à l’élection présidentielle à venir.
A Niamey où il était de passage Alpha Condé a rencontré les joueurs du Syli national pour les encourager. L’histoire ne dit pas qu’il y a eu des espèces sonnantes et trébuchantes, mais ça se pourrait.


Bientôt, si on continue comme ça, il y a aura des coups d’État après chaque défaite d’une équipe nationale en Afrique. Violent et récupéré, le foot est foutu. Moi, désormais, je me contenterai de boire ma bière en regardant les étoiles.

PAR CONAKRYLEMAG.COM

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