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“Purger la presse” : quand Boubacar Yacine Diallo joue au shérif de la morale journalistique

“Purger la presse” : quand Boubacar Yacine Diallo joue au shérif de la morale journalistique

Il fallait oser. Il l’a fait. En plein forum sur l’avenir des médias guinéens, Boubacar Yacine Diallo, président de la Haute Autorité de la Communication (HAC), s’est levé, doigt levé et front plissé, pour sonner l’alarme : il faut, tenez-vous bien, “purger la presse des opportunistes sans foi ni loi”. Oui, vous avez bien lu. Purger. Un mot aussi brutal qu’explicite. Presque médical. Comme si les journalistes étaient devenus un abcès à inciser à vif.

Mais qui purge qui, au juste ? Et selon quels critères ?
Car venant d’un organe censé protéger la liberté de la presse, entendre ce genre de rhétorique a de quoi faire bondir. À croire que la HAC ne rêve plus de régulation, mais de nettoyage. De désinfection morale. Une presse aseptisée, conforme, obéissante. Une presse qui ne gratte pas, ne fouille pas, et surtout… ne dérange pas.

C’est donc ça, la nouvelle ligne : chasser les “faux journalistes” pour sauver l’honneur des “vrais”. L’intention semble noble. En apparence. Car bien sûr, personne ne nie qu’il existe dans le paysage médiatique guinéen des opportunistes, des vendus, des agitateurs au service du plus offrant. Des “journalistes enveloppes”, comme on dit dans les coulisses. Mais alors, question simple : où étaient la HAC et son président pendant toutes ces années de compromission ?

Qui a accrédité ces médias bidon ? Qui a laissé prospérer ces radios de désinformation pilotées par des agents doubles ? Qui s’est tu quand des médias ont été instrumentalisés par le pouvoir ou l’opposition selon les saisons ? Qui, sinon la HAC elle-même, a été complice de cette pollution organisée du champ médiatique guinéen ?

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Et maintenant que la machine s’emballe, voilà que Boubacar Yacine Diallo joue les gardiens du temple. Il sermonne. Il menace. Il dramatise. Mais ce n’est pas d’un grand ménage dont la presse guinéenne a besoin. C’est d’un grand courage. Celui de dire la vérité sur tous les plateaux. Y compris ceux du pouvoir.

Parce que quand le président de la HAC parle de “dénonciateurs de corruption qui en sont eux-mêmes les complices”, c’est aussi une manière très commode de discréditer les journalistes d’investigation, ceux qui dérangent, qui fouillent, qui exposent. Et dans un pays où la ligne entre informer et insulter le pouvoir est de plus en plus floue, ces mots ne sont pas neutres. Ils sont dangereux.

La vérité ? La HAC a failli. Elle a manqué de poigne quand il fallait défendre les journalistes menacés. Elle a manqué de fermeté quand certains patrons de presse ne payaient plus leurs équipes depuis des mois. Elle a manqué de courage face aux ministres censeurs et aux gouverneurs bavards. Et aujourd’hui, au lieu de faire son autocritique, elle brandit le mot “purge” comme un talisman. Pitoyable.

Mais surtout, quelle purge ? Avec quelles règles ? Par qui ? Pour qui ? Sur quels critères ? Et qui décide que tel ou tel journaliste est “légitime” ou non ? Qui a le droit de parler ? De critiquer ? D’investiguer ? Vous voyez le danger ? Derrière la prétendue volonté d’“assainir le milieu” se cache une obsession bien plus politique : contrôler la narration, trier les bons et les méchants, bâtir une presse à deux vitesses — l’une certifiée par le régime, l’autre vouée à la vindicte.

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Et pendant ce temps, les vrais problèmes sont ailleurs :

Des journalistes sous-payés, exploités, harcelés, et parfois même agressés. Des organes de presse menacés de fermeture pour des raisons opaques. Des convocations musclées dans les commissariats, au nom de “l’ordre public”. Une précarité grandissante qui pousse certains à vendre leur silence ou leur plume.

Mais tout cela, apparemment, ce n’est pas ce qui alarme la HAC. Ce qui la dérange, ce sont les “sans foi ni loi”. Ceux qu’on ne contrôle pas. Ceux qui ne chantent pas à la gloire du général. Ceux qui n’entrent pas dans les cases.

Alors non, M. Diallo, la presse guinéenne n’a pas besoin de votre purge.
Elle a besoin de liberté. De protection. De dignité.
Et surtout, elle a besoin qu’on cesse de confondre encadrement et domestication.

Parce qu’une presse qui fait peur, c’est une presse qui fait son travail.
Et si certains veulent du silence, qu’ils aillent le chercher dans une bibliothèque. Pas dans une rédaction.

PAR CONAKRYLEMAG.COM

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