Le dimanche passé, j’avais décidé de rester tranquillement chez moi, de me reposer pour mieux affronter la semaine. La décembrose m’était trop éprouvante, j’en avais marre de tourner en rond sans gain véritable. Déjà que mes poches étaient percées et que je n’avais même pas de quoi m’offrir une bonne bouteille consolatrice, j’ai préféré ne pas faire voir ma gueule dehors. Je me suis donc reclus dans l’espoir d’éviter les embrouilles. Mais ce n’était visiblement pas le bon jour pour avoir la paix.
C’était jour de match. Et moi, j’ai été tellement déçu, par le passé, en supportant le Syli national, que je n’ose plus m’aventurer dans ces histoires à vous provoquer une crise cardiaque. Non pas que je n’aime pas l’équipe nationale. Mais je ne voulais pas mettre mon cœur à rude épreuve. Ça tombait bien. Ma vieille télé est tombée en panne. Je n’ai pas prévu de la réparer de sitôt. D’ailleurs, je n’en ai pas les moyens et ma priorité n’était pas de regarder la télé, mais de survivre.
Mais c’était sans compter avec mon enfoiré de voisin qui n’a pas trouvé mieux à faire ce jour-là que de placer sa télé pourrie au milieu de la cour. Tout l’après-midi, la maison s’est transformée en vidéo-club. Toute la racaille du sous-quartier était là, agglutinée comme des mouches autour du foutu écran d’où on ne pouvait même pas distinguer les images à deux mètres. L’essentiel pour eux était d’être là, de parler n’importe comment, même de ce qu’ils ne voyaient même pas. Ils parlaient si fort et si bêtement qu’il m’était impossible de trouver le repos.
Si j’avais ne serait-ce que le prix d’une bouteille, j’allais me retirer dans le maquis le plus calme. Je me suis résolu à vivre le martyre. Heureusement pour moi, il n’y a pas eu de troisième mi-temps. Le Syli ayant perdu son match, mes salopards de voisins ne sont pas restés très longtemps devant la télé. Ivres de colère contre les joueurs et très déçus, ils se sont dispersés très rapidement. Certains n’ont même pas attendu la fin du match. Et moi, j’ai gagné la paix plus tôt que prévu.
— conakrylemag